Ce matin, dans le quartier de Thioffack Bambara, un signe de détresse unissait les habitants : des brassards rouges noués aux bras. Silencieux ou clamant leur mécontentement, ils étaient dans la rue pour dénoncer l’inaction des autorités face à un drame devenu chronique : les inondations. « Trop, c’est trop », résume l’amertume générale.
Depuis un mois, des pluies d’une intensité exceptionnelle ont transformé leur quotidien en cauchemar. Les eaux ont monté avec une rapidité terrifiante, submergeant plusieurs quartiers et laissant un paysage de désolation. Les rues, devenues des torrents boueux, serpentent entre des maisons partiellement ou totalement englouties. Certaines constructions, souvent bâties à même le sol, n’ont pas résisté à la pression et se sont effondrées.
« La situation est inédite et catastrophique pour notre communauté », déclare Tamsir Ndiaye, le président du comité de développement de Thioffack, visiblement ému. Son constat est accablant : « Plus de 40 maisons sont inondées. Des Daaras (écoles coraniques) ont dû fermer leurs portes à cause de l’eau. Les habitants ont été contraints de fuir en urgence, la plupart du temps sans pouvoir sauver leurs biens. »
Pour les résidents, chaque nouvelle averse est synonyme de terreur et d’impuissance. « Chaque fois qu’il pleut, on ne dort pas. On surveille le niveau de l’eau pour pouvoir évacuer à temps », témoigne une mère de famille dans la cinquantaine, le regard fatigué. L’eau s’infiltre partout, emportant meubles, réserves de nourriture et tout sentiment de sécurité.
Les conséquences s’accumulent : maladies liées à l’insalubrité (paludisme, infections cutanées, diarrhées), pertes économiques dramatiques pour les petits commerçants et artisans, coupures d’électricité récurrentes, routes défoncées et interruption totale de la vie normale. L’absence criante d’un système efficace d’évacuation des eaux pluviales condamne le quartier à revivre le même scénario de détresse après chaque orage.
La frustration est d’autant plus vive que les promesses des autorités semblent vaines. « Nous avons signalé le problème à plusieurs reprises aux autorités, mais rien ne change », se plaint Tamsir Ndiaye. Les habitants évoquent la visite passée du ministre de l’Assainissement, dont les engagements sont perçus comme des « paroles en l’air ».
Face à cette urgence permanente, le quartier lance un appel pressant. « Il faut des travaux sérieux, pas seulement des promesses électorales », martèle un chef de quartier, résumant l’exigence de tous. Ils réclament la mise en œuvre immédiate d’un véritable plan d’assainissement ou de moyens pérennes pour évacuer les eaux.
En attendant une réponse concrète, la peur est l’ombre permanente des habitants de Thioffack Bambara. Chaque nuage à l’horizon devient une menace suspendue au-dessus de leurs têtes et de leurs maisons englouties. Leur brasard rouge est un appel au secours qui ne demande qu’à être enfin entendu.
B. TOURÉ