L’expropriation pour cause d’utilité publique est une notion juridique qui permet à l’État, ou à une personne morale de droit public, de priver une personne de sa propriété immobilière contre son gré, pour des motifs d’intérêt général. Au Sénégal, cette procédure est principalement régie par la Loi n°76-67 du 2 juillet 1976 relative à l’expropriation pour cause d’utilité publique et aux autres opérations foncières d’utilité publique.
Selon l’article premier de la loi précité « L’expropriation pour cause d’utilité publique est la procédure par laquelle l’Etat peut, dans un but d’utilité publique et sous réserve d’une juste et préalable indemnité, contraindre toute personne à lui céder la propriété d’un immeuble ou un droit réel immobilier. L’expropriation ne peut etre prononcée qu’autant que l’utilité publique a été déclarée et qu’ont été accomplies les formalités prescrites par le chapitre II du présent titre ».
Les biens qui peuvent etre exproprié selon l’article 2 de la loi peuvent notamment être acquis par voie d’expropriation pour cause d’utilité publique, les immeubles et droits réels immobiliers de toute nature nécessaire à la réalisation de projets relatifs :
– à tous travaux publics ;
– à l’installation, au fonctionnement et à l’accomplissement de l’objet des services de l’Etat et des autres personnes morales publiques, des sociétés de l’économie mixte contrôlées par l’Etat, des entreprises prioritaires ou conventionnées, des représentations diplomatiques ou consulaires et des organismes internationaux ainsi qu’au logement du personnel de ces services, sociétés, entreprises, représentations et organismes ;
– à la salubrité publique ;
– à la sécurité intérieure et à la défense du territoire ;
– au reboisement et à la conservation des forêts et des sols ;
– à la recherche et à l’exploitation des substances minérales (travaux d’extraction, travaux de construction des bâtiments et ouvrages nécessaires au fonctionnement de l’entreprise, au logement du personnel, à la transformation et à l’évacuation des produits extraits) , au captage, à l’extraction, à la production, au transport et à la distribution de l’eau, de l’énergie électrique, des gaz combustibles ou des hydrocarbures , aux aménagements hydroélectriques, aux installations liées à la recherche atomique ou à la production de l’énergie atomique aux aménagements hydroélectriques, aux installations liées à la recherche atomique ou à la production de l’énergie atomique ;
– à l’application des plans directeurs, d’urbanisme et de lotissement, ainsi qu’à la réalisation des constructions et installations, prévues aux dits plans ;
– à l’exécution des plans de développement et des programmes d’aménagement (opérations d’intérêt économique ou social, implantation d’installations industrielles, commerciales ou agricoles, opérations destinées à assurer progressivement et suivant des plans d’ensemble, l’aménagement, l’équipement ; la construction et la mise en valeur de zones affectées à l’habitation, au commerce, à l’industrie, à la culture, à l’élevage ou au boisement par des projets prouvés).
L’utilité publique est déclarée par décret qui fixe le délai pendant lequel l’expropriation devra être réalisée. Ce délai ne peut être supérieur à trois ans. Les effets de la déclaration d’utilité publique peuvent être prorogés, par décret pour une durée au plus égale à deux ans. La déclaration d’utilité publique est précédée d’une enquête dont l’ouverture est annoncée au public par tous moyens de publicité habituels ; pendant la durée de l’enquête toute personne intéressée peut formuler des observations.
L’indemnité doit être juste et préalable. Elle vise à compenser la valeur du bien exproprié et les préjudices directs causés par l’expropriation (par exemple, perte de revenus pour une entreprise, frais de déménagement). Des indemnités distinctes peuvent être accordées aux titulaires de droits différents (nu-propriétaire, usufruitier, etc.). Le paiement ou la consignation de l’indemnité définitive est une condition pour la radiation des droits réels sur l’immeuble exproprié. A défaut d’accord amiable, l’expropriation est prononcée et les indemnités sont fixées par un juge du tribunal de première instance de la situation de l’immeuble, appelé juge des expropriations et désigné pour deux ans par le premier président de la Cour d’appel.
Selon l’article 12 de la loi précité « L’ordonnance d’expropriation ne peut être attaquée que par voie du recours pour excès de pouvoir devant la cour suprême ».
En somme, l’expropriation pour cause d’utilité publique au Sénégal est une procédure encadrée par la loi, visant à concilier l’intérêt général avec la protection du droit de propriété individuelle, en garantissant une juste compensation au propriétaire.
Ahmed SOW, Juriste en Droit Privé spécialisé en droit des Affaires
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