1960 c’est l’année à laquelle notre pays le Sénégal a accédé à l’indépendance. C’est l’année du réveil de toutes les consciences pour savourer les délices que procure la libération du peuple du joug colonial qui a duré près de trois siècles. C’est l’année de notre marche vers le Festival Mondial des Arts Nègres en 1966, voulu et organisé par le président poète Léopold Sédar Senghor, premier président du Sénégal. Partout, c’est l’effervescence surtout sur le plan culturel qui voit la naissance d’une foultitude d’artistes toutes disciplines confondues. C’est ce moment là, qu’une étoile nommée Mada Thiam sort de la banlieue dakaroise pour voler la vedette à tous les artistes chanteurs traditionnels de sa génération. Elle composa un tube appelé « Laye Niakh », qui supplanta toutes les compositions populaires de l’époque. Laye niakh, c’est le nom d’un chauffeur de taxi qui avait ravi le cœur de la nouvelle vedette de la chanson Sénégalaise. Radio Sénégal, la seule à l’époque, nous serinait à longueur de journée, cette chanson qui se répétait jusque dans les hameaux les plus reculés. C’était une chanson d’amour qui faisait de ce chauffeur de taxi une célébrité dans tout le pays.
« Laye niakh, je t’ai choisi parmi tous les hommes de ce pays car pour moi, tu es un Dieu. Je me sens seule la nuit si tu n’es pas auprès de moi. Alors le doute et la solitude envahissent mon cœur et je sombre dans la misère. Mais pendant la nuit si je te sens près de moi, mon cœur reverdit comme les fleurs d’un printemps précoce ». Telles étaient les paroles de cette chanson composée par Mada Thiam qui avait, à l’époque l’une des plus belles voix sinon la plus belle. Elle était maîtresse de sa voix douce et violente comme la vie, qui produisait des ondes d’une pureté incomparable.
C’est sur ce fait, que le célèbre saxophoniste Bira Guèye, l’intégra dans son orchestre où elle fit feu et flamme. Par ses chansons toutes belles, toutes scintillantes comme un tesson d’étoile, Mada Thiam avait enflammé beaucoup de cœurs à travers des compositions dignes de la grande virtuose qu’elle était. Elle n’a pas vécu longtemps, terrassée par une maladie qui l’arracha à notre affection. Elle n’eut pas hélas les funérailles qu’elle méritait, tout comme « son Dieu » qui, quelques temps après, est allé la rejoindre pour continuer leur amour loin des regards indiscrets.
Mada Thiam, quoique que brève fut sa carrière musicale, s’imposa dans nos mémoires avec des souvenirs agréables à raconter. Son morceau dédié au festival 66 fut tellement réussi que Radio Sénégal en fit l’indicatif du journal en wolof que présentait feu Elhadj Ousseynou Seck. C’est avec un immense plaisir que nous nous souvenons de cette grande diva qui a bercé les cœurs de tous les sénégalais.
Majib Sène