Dix ans après leur licenciement jugé abusif par la société SAIPEM SA, 91 travailleurs sénégalais, regroupés au sein d’un collectif, ont tenu un point de presse ce mardi à Dakar. Leur objectif : dénoncer ce qu’ils qualifient de « déni de justice » et interpeller les autorités sénégalaises pour que leurs droits soient enfin reconnus.
En 2016, ces travailleurs, recrutés à travers la filiale GLOBAL Petroprojects Services AG, avaient reçu des lettres de licenciement sans motif valable, alors qu’ils travaillaient depuis plusieurs années sous contrat. Aucune indemnité de licenciement ne leur avait été versée, contrairement aux dispositions du Code du travail.
Depuis 2017, les ex-employés ont multiplié les recours devant les juridictions sénégalaises. Le collectif rappelle que le Tribunal du travail les avait déboutés une première fois, estimant que la procédure préalable devant l’Agence nationale des affaires maritimes (ANAM) n’avait pas été respectée. Après une nouvelle tentative, les juges ont ensuite considéré que la preuve de la relation de travail n’était pas établie, malgré la présentation de nombreux documents (contrats, certificats de travail, bulletins de salaire, lettres de licenciement.
En 2021, la cour d’appel a reconnu l’existence d’un contrat à durée indéterminée (CDI) pour 19 travailleurs parmi les 91 concernés, avant de juger leurs actions irrecevables, invoquant un procès-verbal de conciliation signé en 2008. Une décision confirmée par la Cour suprême en 2022, puis par un arrêt définitif en 2023.
« Comment peut-on recevoir une plainte avec des lettres de licenciement datées de 2016 et affirmer que nous n’avions plus de relations de travail depuis 2008 ? », s’interroge le coordonnateur du collectif, Abdou Diedhiou.
Le collectif affirme que certaines contradictions subsistent : SAIPEM aurait délivré des certificats de travail à des personnes licenciées en 2016, preuve que leurs relations contractuelles s’étaient poursuivies bien après 2008. Pour les travailleurs, ces décisions reflètent l’existence de « connivences » qui auraient permis à la société d’échapper à ses responsabilités.
Les travailleurs rappellent que SAIPEM a déjà été condamnée dans des affaires similaires par plusieurs juridictions françaises : la cour d’appel de Versailles (2022 et 2024), celle de Douai (2024) et celle d’Aix-en-Provence (2024). Ces décisions, selon eux, montrent que la société est « coutumière des faits ».
À travers ce point de presse, le collectif lance un appel pressant aux autorités sénégalaises afin qu’elles se saisissent du dossier. « Nous exhortons l’État à faire preuve de patriotisme et de vigilance pour protéger les droits des travailleurs sénégalais », insiste Abdou Diedhiou.
Au-delà de leur propre cause, les travailleurs estiment que cette affaire doit servir d’alerte pour prévenir de futures pratiques abusives d’entreprises multinationales opérant au Sénégal.